Un tête à tête entre amis

Il avait longtemps été occupé, Lexhor, les dernières semaines et même les derniers mois. Et il n'avait eut que trop peu de temps pour prendre soin de sa famille et de ses amis, pour discuter avec eux et leur montrer à quel point il était heureux de les avoir auprès de lui et combien il les estimait. Et c'était notamment le cas d'une jeune femme au caractère bien affirmé et qui pourtant acceptait cet état de faite et surtout le caractère du Duc...
Il avait maintenant plus de temps pour lui, mais également pour les autres. C'est pourquoi il avait donné rendez-vous ce dimanche, jour de marché, à Zelenka à la sortie du château, dans la basse-cour et plus précisément dans son coeur, les halles, dans le but de passer un peu de temps avec elle et de se balader un peu dans le village d'Alluyes qu'elle ne connaissait que très peu. Ce serait l'occasion de le lui faire découvrir et de la conduire en un lieu qu'appréciait beaucoup Lexhor et où il allait souvent se ressourcer. Ce serait le terme de leur promenade...

La veille au soir un gamin s'était pointé missive à la main et l'avait donné à Zelenka, un rendez-vous, oui un rendez-vous! et pas avec des moindres non non avec le duc lui-même! Lexhor! Par Ari cela faisait des semaines que la jeune femme ne l'avait plus vu, oh elle avait bien de ses nouvelles par personnes interposées mais sans plus, c'est qu'il est sacrément occupé l'duc! C'était donc avec joie qu'elle irait le rejoindre le lendemain dans la matinée, en plus elle n'était jamais allé dans ce coin-là.
Levée dès le poitron-jacquet la Zel se dépêchait de se préparer, elle savait bien qu'elle était souvent en retard, habillée de sa houppelande et d'une lourde cape dont la capuche couvrait sa tête et préservait le jeune femme de la fraîcheur matinale. Elle était finalement plus nerveuse qu'elle ne l'aurait cru, se demandant si ce rendez-vous ne cachait pas une autre raison que juste celle de se promener afin de discuter tranquillement. Lexhor aurait-il en tête un nouveau projet pour elle? Cette question lui avait traversé l'esprit un instant avant d'être chassée par le spectacle que lui offrait le levée de soleil et ses couleurs chatoyantes.
Enfin arrivée au château d'Alluyes elle était proche du lieu où Lexhor l'avait conviée, d'ailleurs une silhouette bien connue de la Zel se dessina au loin. C'était sans aucun doute lui. Elle s'approcha de lui puis se racla légèrement la gorge pour qu'il puisse réaliser qu'elle était à ses côtés. Elle ne savait plus si elle devait s'incliner devant le duc qu'il est, dans l'expectative elle préféra baisser la tête quelques secondes puis le salua comme si de rien n'était.

Bonjour Lex, tu m'as fait demander, je suis là. Comment vas-tu depuis tout ce temps? Bien j'espère! lui dit-elle en souriant.

Après quelques minutes à profiter du soleil et à observer la vie du village, Lexhor, capuchon sur la tête et longue cape sur le dos, vit arriver son amie, fidèle au rendez-vous, comme d'habitude. Il n'était pas surpris de la voir mais il n'en était pas moins heureux de la voir et il s'inclina légèrement pour la saluer. Instinctivement il lui tendit son bras pour qu'elle le prenne et ils commencèrent à avancer.

Bonjour Zel, et bienvenue à Alluyes. Léger sourire. Il est vrai que nous avons eu peu le temps de nous parler ces derniers mois. Ma charge de duc m'a beaucoup occupé et à peine en ai-je été libéré que nous prenions la route pour honorer la levée de ban de la reyne. Même si nous avons voyagé ensemble les discussions de courtoisie n'étaient pas des plus adaptées. Voilà pourquoi je t'ai fis venir ici.

Ils avaient fait quelques pas et se trouvaient maintenant au milieu des halles et de sa vie. Lexhor se tût quelques instants avant de reprendre.

L'amitié est pour moi quelque chose d'important. Important mais jamais acquis. Nous sommes amis et pourtant j'ai parfois la désagréable sensation de te délaisser. Or tu es toujours là pour moi, sans faillir ni rechigner. Ta bonne humeur et ta joie de vivre communicative est très importante pour moi. C'est pour ça que je voulais passer un moment avec toi. Afin de te dire que même si parfois je peux paraître loin, tu n'es jamais très loin pour moi.

Il sourit puis ne put retenir un léger rire. Je ne serai pas marié, on pourrait croire que je te fais une déclaration d'amour. Mais ce n'est pas si loin au final. L'amitié est un sentiment proche de l'amour. Et j'ai beaucoup d'amitié pour toi.
Je ne vais pas m'étendre plus, je pense que le message est passé.
mais j'aimerai rattraper mon retard et que tu me parles un peu de toi, de ce qu'il s'est passé dans ta vie et que j'ignore, ainsi que les projets que tu pourrais avoir...

Il lui sourit chaleureusement. Leur ballade les avait conduits jusqu'au pilori inutilisé ce jour là.

Zel se laissa emporter par son ami et avança lentement à ses côtés en buvant les paroles de son duc préféré. L'endroit était fort chaleureux rempli de vie, la jeune femme appréciait de voir que les gens avaient l'air d'être heureux.

Oui c'est vrai que nous n'avons guère eu le temps pour les bavardages durant la levée de ban de la reyne, nous avions bien d'autres choses à faire. Mais tu sais à quel point j'aime toujours autant être auprès des Lames, c'est réellement ma famille maintenant.

Lexhor continua sur sa lancée et commença à parler de l'amitié, de leur amitié.

Je t'arrête Lex, saches que même si nous n'avons pas le temps nécessaire pour passer des moments ensemble notre amitié ne s'évanouira pas comme cela. J'ai l'amitié tenace et sauf si l'on me trahit lorsque je donne cette chose si précieuse c'est pour de bon, c'est solide. puis il parla d'amour et là la Zel se mis à rire aux éclats Non Lex par pitié parle pas d'amour! Roooh manquerait plus que Nalu t'entende et s'imagine des choses.... Et puis tu sais que l'amour est bien loin de moi maintenant, ma carapace s'est reformée encore plus coriace et impénétrable qu'avant.

Et puis je ne sais que te dire sur ma vie car ma vie tu la connais c'est devenu les Lames.

Le duc écouta la jeune femme attentivement tout en continuant de marcher. Ils s'éloignaient maintenant des halles et quittaient peu à peu le centre du bourg. Au loin l'on pouvait voir la pointe du moulin et son hélice majestueuse. Mais les deux amis approchaient du four banal où les boulangers d'Alluyes étaient tenus de faire cuire leur pain. Passant devant une échoppe en cours d'approvisionnement, Lexhor acheta deux petites brioches. Il tendit l'une d'elle à Zelenka avant de croquer dans l'autre.

Je suis heureux de savoir le fond de ta pensée et honoré d'avoir une amie si fidèle. Partager un moment simple comme nous le faisons aujourd'hui vaut tout l'or du monde.

Il désigna alors le moulin de son doigt, avala une bouchée de brioche puis repris.

Les meuniers d'Alluyes qui travaillent dans ce moulin, et les boulangers que l'on peut croiser dans cette rue travaillent ensemble tu t'en doutes, pour les besoins de leurs activités respectives. Mais si cette brioche est si bonne, si ces artisans prospèrent, c'est parce qu'ils ont bien compris que leur intérêt était commun et qu'ils ont tissé des liens bien plus forts que les simples relations de commerce. Ils sont solidaires et soudés. Ils forment une famille en quelque sorte. Il arrive même que pour sceller leur amitié, certaines familles de boulangers marient leur fille ou leur fils aux filles ou aux fils de familles meunières. Une vraie communauté.

Il regarda de nouveau son amie, sourire au lèvre.

C'est exactement comme nous, comme les Lames. Certes nous n'avons pas besoin les uns des autres pour prospérer économiquement, bien que chacun répondra présent pour aider l'autre, mais nous avons besoin les uns des autres pour nous épanouir.
Notre amitié, l'amour que nous nous portons tous, peut déplacer des montagnes. Nous avons fois les uns en les autres, nous confierions nos vies à chacun de nos membres et nous donnerions notre vie pour eux.

Il resta silencieux quelques instants. Le moulin était maintenant bien plus visible et se dressait majestueusement devant eux. Lexhor s'arrêta un instant pour le regarder, avant de reprendre son chemin et le fil de son histoire.

Et ce lien, cette amitié qui peut unir hommes et femmes peut déplacer des montagnes. Ou édifier des moulins. Il y a quelques années maintenant, un incendie ravagea ce moulin. Il fut tout de suite reconstruit par les meuniers, mais aussi par les boulangers. C'est un symbole. Je suis très attaché aux symboles et à ce qu'ils expriment. Ce moulin n'est pas indispensable pour que l'amitié qui lie les meuniers et les boulangers perdure ou même se renforce. Mais il la représente et c'est ce qui le rend encore plus beau.

Il finit alors par se taire, songeur, et observa les alentours, presque comme s'il était émerveillé d'un spectacle qu'il voyait pour la première fois...

Les deux amis continuèrent leur chemin tranquillement, c'était un de ces moments rares où la sérénité et les liens qui unissent des personnes se fortifient. L'amitié est une chose assez rare pour que l'on prenne du temps pour elle, afin qu'elle perdure et se bonifie. Le duc est une personne très prise et cela se comprend fort bien au vu des responsabilités qui lui incombent et la jeune femme elle n'est qu'une simple boulangère et elle s'occupe aussi de faire correctement pousser son maïs. Elle tente de faire de son mieux pour être présente dès que l'on a besoin d'elle et elle essaie de profiter de la vie telle qu'Aristote lui a donné. Et les choses simples telle qu'une brioche, elle les appréciaient surtout quand elle est en si bonne compagnie.

Elle remercia le duc lorsqu'il lui tendit cette fameuse brioche qu'elle s'empressa de croquer et d'avaler sa bouchée. Hmm dis, elle est succulente cette brioche! Lex! Faut que j'achète de la farine ici pour les miennes! lui dit-elle en souriant.

Le duc lui parla de la fraternité des Lames, ça aussi c'est une chose précieuse aussi précieuse que l'amitié entre deux êtres.

Tu sais c'est une des raisons qui me font rester auprès des Lames, cette entente entre nous tous, cette fraternité, cette entre-aide naturelle. Je pense vraiment que nous formons une vraie famille nous tous, les Lames. Et j'espère que l'on préservera ça, que personne d'extérieure ne viendra troubler l'ambiance. J'apprécie que l'on prenne du temps avant d'intégrer une personne étrangère, que l'on tente de la connaitre mieux avant même de l'intégrer. Tu vois, j'y tiens à notre famille, je tiens à chacun de ses membres tous sont importants pour moi.

Le soleil commençait à s'élever haut dans le ciel et une chaleur relative se faisait sentir, la jeune femme cuisait un peu sous sa capuche qu'elle fit retomber en arrière afin de découvrir sa chevelure noire corbeau.

Lexhor terminait de déguster sa brioche tout en écoutant Zelenka. Il était heureux de savoir la jeune femme épanouie et ayant trouvé un certain équilibre au sein de sa mesnie. Il n'en rajouta pas, tout était dit.
Les deux amis s'éloignaient maintenant de l'agitation du bourg et le chemin qu'il prenait s'enfonçait de plus en plus vers une clairière arborée qui s'étendaient devant eux. Ils n'étaient pas sortis de la basse cour du château mais on se serait cru à l'orée des bois...
Après quelques dizaines de mètres supplémentaires ils arrivèrent tous deux à Pierre-Coupe...

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