Un retour, un départ...la Vie !

Messages : 529 Date d'inscription : 17/07/2010

F.Villon, Le lais - 1456

J'ai fait l'acquisition de ce recueil de poèmes d'un jeune écrivain, quelque peu chahuté, il me semble, de par le sens de son écriture. Pour mon choix, je le trouve truculent à souhait !
S'il vous plait d'entendre davantage, je vous en ferais la lecture, mon Chéri.

Assise auprès de son époux, Della le veillait depuis son retour du front.
Blessé gravement, souffrant sans cesse, le Baron resterait très probablement estropié. Qu'il soit en vie était en soi, un miracle, tenant compte des traitements extrêmes qu'il avait subi.
Convaincue qu'il ne devait la Vie qu'à l'action de ses prières, la Baronne passait son temps entre la garde du malade et les prières encore et encore.

Cela faisait plusieurs jours, déjà, que Kéridil était arrivé à Montpipeau, sous la bonne garde et bienveillance de son serviteur-secrétaire-bonne à tout faire, le très cher Julien.
A leur arrivée, Della n'avait rien remarqué de spécial, bien trop attentive à soigner Kéridil, à l'installer au mieux, à faire venir moult médicastres et rebouteux.
Mais au fil des jours, il lui semblait que l'attitude de Julien changeait.
Avait-il vécu tant de choses horribles qu'il en soit marqué définitivement ?
Ou était-ce une amourette, une fiancée, peut-être, qu'il désirait introduire à la petite "cour" baronnale ?

Kéri Chéri sombrait dans un sommeil réparateur, pourvu qu'il le soit, aidé de drogues toujours plus fortes.
La Baronne en profita pour questionner Julien, l'ayant emmener dans un coin de la chambre du Baron.

Julien, je ne vous ai point encore remercié comme il se doit, pour tout ce que vous avez fait...veiller Kéridil, le ramener jusqu'ici...Sans vous, j'ignore ce qu'il serait devenu. Vraiment, il peut être heureux de vous avoir à ses côtés.
Le sourire est vrai, chaleureux, engageant peut-être à la confidence...

Messages : 627 Date d'inscription : 28/12/2009 Localisation : Orléans

Keridil était ravi de ce traitement. Son épouse était adorable et adorée, et son choix de lectures était toujours avisé. Sa voix était agréable à l'ouïe, et son époux était ravi de l'entendre quelques fois par jour.

J'aime beaucoup.

Puis quand l'obscurité tomba, après que les rideaux du baldaquin se furent refermés - Keri, un visionnaire, même en literie - le Baron s'endormit, loin de la paix d'avant guerre, mais dans une douleur relative, et dans un calme du à l'opium, son amour.

Je ne m'étais pas attendu à ce que la Baronne me rejoigne dans cette alcôve où je lisais souvent, attendant des ordres, ou entre deux prises de notes pour mon maître. Certes, je lui avais mandé audience, mais mon imagination m'avait alors mené dans un boudoir, et non si près de Keridil.
Aux mots de Della, j'acquiesçai. Qu'aurais-je pu faire d'autre que sauver cet homme qui n'avait fait que montrer bonté avec moi ?

C'est bien normale, Madame, et tel est mon devoir...et puis, jamais le Baron ne m'a donné raison de désirer son trépas. D'autres valets n'en diraient pas tant de leurs Seigneurs. Mais je suis un homme fautif, Baronne, et je désire me confesser à vous. Le puis-je ? Je vous sais aristotélicienne, puis-je compter sur votre indulgence ? Je crains les prêtres, et ne parlerai qu'à vous, ma Maîtresse.

Messages : 529 Date d'inscription : 17/07/2010

La piste de l'amourette était peut-être la bonne. Julien aurait-il engrosser une jeune fille quelque part en chemin ?
Il faut sans doute chercher dans l'état de la Baronne, le fait que ses pensées se concentrent sur grossesse-enfant-et compagnie.

Elle s'installa plus confortablement, calant son dos contre le dossier du siège sur lequel elle avait pris place, invitant Julien à faire de même, en face d'elle.
Puis, d'une voix douce, non pas craignant de déranger son époux, les drogues l'assommant littéralement, mais plutôt pour ne pas effrayer Julien, pour le mettre en confiance aussi, elle lui répondit :
Julien, notre foi nous demande aussi d'ouvrir notre coeur à notre prochain, de l'écouter également. Vous pouvez vous confier à moi, personne ne saura rien de ce que vous me direz. Parlez sans crainte.
Julien faisait partie de la vie de Kéridil et donc aussi de la sienne. Elle l'avait toujours connu auprès de son époux, fidèle à chaque ordre, chaque mission. Il était naturel que Della lui offre son écoute et si possible, ses conseils.

Messages : 627 Date d'inscription : 28/12/2009 Localisation : Orléans

C'est que la Baronne était une femme impitoyable à certains égards, mais de qui émanait en d'autres occasions une douceur rare. L'avoir côtoyée de si près m'empêchait de présager sa réaction. Elle était double.
Mais puisqu'elle disait de lui ouvrir son coeur, je le fis sans ambages.

Madame. J'ai fauté. Depuis plusieurs mois, j'ai fréquenté des lieux de pauvre vertu...J'y ai certes rencontré des femmes, mais je m'y suis mêlé avec des hommes, et ce sont de ces fautes que punit le Très Haut. Mon amant est mort, et en cela je vois le seul signe de sa punition. Je souhaite me retirer dans les ordres.
Le Baron ne le comprendrait sans doute pas. Je ne puis m'ouvrir qu'à vous, et cela me déchire. Croyez le.

Alors ? Le fouet ? Le pardon ? Le mutisme ?
Ma jambe fut prise d'un tremblement, et comme pour me protéger, je fis un mouvement de retrait. Pour me rassurer, je pensai que mon maître dormait, non loin ; mais, fautif, je m'abusai en pensant qu'il prendrait ma défense contre sa propre épouse, alors que, juste son humble serviteur, j'avais péché mortellement, et déshonoré sa maison.

Messages : 529 Date d'inscription : 17/07/2010

Une main fine et légèrement tremblante vint se poser sur les lèvres entrouvertes, dénonçant l'état de trouble dans lequel venait de tomber Della.
Les aveux de Julien la choquèrent, certes. Sa franchise lui valut sa bienveillance, tout aussi certainement. Là où était le repentir, le pardon pouvait venir...D'ailleurs il disait lui-même vouloir se retirer du monde séculier afin de se consacrer au service du Très Haut.
Ce qui la chiffonnait sans doute le plus, là dedans, c'était l'attirance qu'un homme pouvait avoir d'un autre et qu'une femme pouvait avoir d'une autre. Et là, le miroir n'était pas aux alouettes...Della se rappela les mots de la Colombe..."il aurait été plus simple que nous soyons l'une homme, et l'autre femme, car jamais couple ne se serait si bien compris."...Elle ne pouvait dès lors pas blâmer Julien comme elle l'aurait fait si elle-même n'avait eu tout au fond d'elle, ce sentiment inavouable pour la Bretonne.

Troublée donc, elle était.
Partagée aussi, écartelée même entre ses pensées paradoxales.
Elle ne pouvait décemment accorder un pardon sans sourciller, cela aurait intrigué très certainement Julien. Il ne lui était pas possible non plus de punir rudement sans qu'elle ne souffrit elle-même du châtiment injuste.

Elle se redressa, dans le fauteuil, posa son regard bleuté sur Julien, chercha le sien...

La mort de votre...ami...Répugnant de dire "amant"...est très grave et très triste. Notre Seigneur cependant, vous le savez, est très clément avec les âmes des repentis et sans doute...votre ami est-il à présent en paix. Elle voulait se rassurer, autant que réconforter Julien, sans aucun doute.
Votre volonté de désormais vivre au monastère est une démarche très humble, Il le verra.
Hélas, je ne peux vous donner le pardon qu'un clerc vous donnerait et je vous engage à vous rendre bientôt au confessionnal...votre âme à tout à y gagner.
Se laissant à nouveau aller contre le dossier afin de soulager une douleur naissante au bas des reins, elle reprit :
Je ne mettrai pas Kéridil au courant de la raison pour laquelle vous le quittez. Je vous donne ma parole que s'il apprend un jour la vérité, ce ne sera pas de ma bouche.
Nous lui dirons que...vous aspirez à une vie de piété et qu'en cela, il faut voir un appel divin à respecter. Ce qui est le cas.
Toutefois...en guise de pénitence...je vous demanderais de prier chaque jour pour les âmes égarées telles que la vôtre et celle de votre ami. Jurez-moi de vous y tenir, jusqu'à votre mort.

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